Pour patienter jusqu'en Octobre, extraits de "Petit Eloi et le Géant de Bacou"
L’arbre graffiti
Il y a fort longtemps de cela, à l’orée d’un village, un hêtre centenaire magnifiait les pâturages. Cet arbre merveilleux s’élevait jusqu’aux cieux, caressant de son feuillage les nuages moutonneux.
Il était si grand que tous les enfants du bourg, à la courte échelle se dressant vers le ciel, ne suffisaient pas à toucher la cime du géant.
Dessous, les amoureux aimaient se retrouver à l’heure des premiers rendez-vous. En témoigne la multitude d’empreintes d’émotions, d’initiales entrelacées, qui en recouvre l’énorme tronc.
Aussi, au village de Bacou, chaque âme l’appelait l’arbre à mots doux.
...
Le secret
Le vieux hibou aimait à raconter à qui voulait l’entendre les histoires d’amour qui s’étaient tissées devant lui au fil des jours.
Aussi, sitôt l’enfant grimpé, il se mit à conter :
— J’en ai vu défiler, tu sais, des amoureux : des vieux, des même un peu gâteux, des bigleux, des enrobés, des maigrelets, des beaux, des moches, des plus ou moins cloches, sans compter des maladroits bien plus que toi.
Tous espéraient et un jour c’est arrivé.
C’est que le géant, vois-tu, est non seulement fantastique, mais aussi magique !
Il réalise, comme aucun autre, tous les vœux des amoureux formulés à ses pieds. Il a également le pouvoir de sceller tout amour gravé sur sa tendre écorce argentée.
— Même le plus farfelu ?
-Même le plus hurluberlu !
...
Parade
Si bien que, lorsque ces mêmes types revinrent au village, tous les villageois, en tête Petit Éloi, leur firent barrage. Coude à coude, encerclant l’arbre à mots doux pour le protéger de ces fous, ils étaient prêts à faire feu. Derrière eux : tomates, patates, des choux, de la boue, des petits pains… tout ce qu’ils avaient trouvé sous la main. Même le père Firmin avait apporté du crottin.
Bref, de quoi livrer bataille à ces canailles !